lundi 25 février 2013

Philip Roth: Exit le fantôme

Exit le fantôme                 

On ne présente plus Nathan Zuckerman, le double littéraire de Philip Roth. Le voici de retour à New York, après avoir vécu onze années en ermite dans la campagne du Massachussetts, afin d’y subir une intervention bénigne censée arranger ses problèmes humiliants d’incontinence. C’est le retour de Zuckerman, mais aussi celui de George W. Bush, réélu. Dans une ville accablée par cette réélection, notre héros va se trouver confronté à trois personnes qui vont, le temps d’un roman dense et émouvant, le renvoyer à ses années de jeunesse. 
La muse vieillie et malade de son mentor, un jeune homme fringant et insupportable décidé à révéler le secret de ce mentor, et une jeune femme mariée, intellectuelle, farouchement anti-Bush, extrêmement attirante et avec laquelle l’écrivain invente des tirades enflammées dignes du meilleur théâtre de marivaudage. Zuckerman va se donner pour mission de sauvegarder la mémoire de son maître, d’aider financièrement la vieille femme atteinte d’un cancer et de conquérir Jamie, la très charmante et sexy jeune femme mariée.
Mais comment résister aux assauts répétés et presque violents du jeune malotru, décidé à violer coûte que coûte l’image et la mémoire de E.I. Lonoff, quitte à se faire un ennemi de Nathan Zuckerman ? Lequel, ayant très vite pris cet arriviste en grippe, s’imagine qu’il est l’amant de sa Jamie, qui dément lors des tirades doublement imaginaires, et très belles. 
Et comment attirer Jamie, si ce n’est par de belles phrases qui restent sur le papier ? Grâce à son imagination débordante, Nathan Zuckerman revit les délices et les affres de l’amour-passion, il rajeunit, se sent fort. Mais il se rendra compte rapidement qu’il n’est pas de taille à affronter le jeune arriviste, qui ne cesse de le harceler afin d’obtenir des informations sur Lonoff. A l’issue d’un ultime et poignant dialogue rêvé au cours duquel il supplie Jamie de le rejoindre à son hôtel, il choisit de disparaître. Il n’a plus la force de lutter, il comprend qu’il doit s’effacer pour laisser la place aux jeunes, à leurs appétits, à leurs peurs.
C’est bien sûr le roman de la vieillesse, le portrait d’un homme dépassé par son époque, sa vitesse, ses défis. C’est le roman de la lucidité, du renoncement, servi par une écriture originale, haletante, introspective. Si vous aimez Philip Roth, vous ne raterez pas cet opus.


Roman, Gallimard, 2009 pour la traduction française.



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