Un
couple se sépare pour une semaine. La semaine de Hanouka. Ils sont mariés
depuis trente ans et ont toujours été ensemble. Mais il s’agit d’une situation
exceptionnelle : Daniella se rend en Afrique centrale pour voir son
beau-frère et faire le deuil de sa sœur aînée, morte un an auparavant, et Amotz
est retenu à Tel-Aviv par son travail : il dirige un bureau d’études de
construction d’ascenseur, et leur dernière réalisation ne satisfait pas les
utilisateurs.
Le
roman s’égrène au fil de sept chapitres, pour sept bougies qu’Amotz allumera
avec son père, sa belle-fille et ses petits enfants, sa fille, son fils à la
base militaire où il se trouve aux arrêts après avoir trop séché ses périodes
de réserve... tandis que Daniella affronte
une toute autre réalité : celle de son beau-frère, veuf, homonyme
du prophète Jérémie, qui porte encore le deuil de son fils mort pendant son
service militaire sous un « feu amical », autrement dit abattu par
erreur par ses camarades lors d’une embuscade, et qui refuse tout contact avec
Israël et le judaïsme, au point de vouloir rester en Afrique.
Avraham
B. Yehoshua décrit avec une rare maestria les relations familiales, avec d’un
côté un grand-père aux prises avec tous les membres de sa famille, soit trois
générations, et de l’autre une femme ayant toujours été surprotégée par son
époux, soudain seule face à un septuagénaire devenu étranger à force d’aigreur,
de douleur, d’égarement. Chaque chapitre est divisé en paragraphes alternant
avec une rigoureuse régularité les voix d’Amotz et de Daniella, au gré de la
fête de Hanouka et de ses bougies allumées soir après soir, porteuses d’espoir
et de chaleur. On se prend à redouter le retour de Daniella à la turbulence
tel-avivienne après son séjour au cœur d’un continent dévasté, auprès d’un
homme qui ne l’est pas moins. L’étrangeté africaine rejaillit sur Tel-Aviv et
Jérusalem par le biais d’ascenseurs défectueux qui seront source de bien des
surprises. A tout ceci s’ajoute le poids du souvenir d’Eyal, mort sous les
balles d’un feu amical, et qui hante la majorité des protagonistes de ce récit,
porté par un souffle qui ne vous laissera pas retomber de sitôt. Peut-être
aurez-vous du mal à y entrer, mais une fois dedans, vous ne pourrez être
qu’emporté par cet ascenseur littéraire, admirable construction qui vient
confirmer, si vous en doutiez, le génie de son auteur.
Roman, Calmann-Lévy;
2008
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire