lundi 25 février 2013

"Lullaby to my father", d'Amos Gitaï

lullaby-to-my-father.jpgGitaï s’attache à retracer de manière intimiste le portrait de son père, étudiant en architecture dans la célèbre école Bauhaus, avant d’être expulsé d’Allemagne vers la Suisse en 1933. C’est un hommage, une réhabilitation de l’honneur de Munio Weinraub, et une plongée au cœur des principes de l’école Bauhaus. Il ne faut donc pas s’attendre à du cinéma. C’est un documentaire, lent, paresseux, qui prend son temps pour nous dévoiler le destin de Munio Gitaï Weinraub, Juif allemand dont le rêve de poursuivre des études d’architecture fut brisé par l’ascension des nazis.
Expulsé vers la Suisse à la suite d’un procès expéditif, mis en scène par le réalisateur comme une farce, il rejoint la Palestine où il s’installe et fonde une famille. Gitaï mêle des images de fiction, tournées avec l’aide de l’actrice Yael Abecassis, qui nous replongent dans les années 30, et certainement avant avec la mise en scène de la naissance de Munio dans une forêt de Pologne, à des images proprement documentaires où apparaissent sa fille, un ami de Munio, des travellings le long d’immeubles et de forêts enneigés en Europe, qui ne sont pas sans rappeler "Shoah" de Claude Lanzmann, ainsi qu’à une scène tout à fait poétique et crépusculaire où apparaît Jeanne Moreau filmée de loin dans un clair-obscur, lisant des textes de Munio. Alors oui, on s’ennuie au début, on ne comprend pas trop le parti-pris de Gitaï de filmer longuement et en très gros plan l’ami qui a reçu Munio en Suisse, à présent résident d’une maison de retraite, évoquant les principes du Bauhaus qu’il pense encore vivants en Israël.

On  est gêné par cette proximité forcée avec cet homme diminué. De même qu’on est gêné par une séquence assez longue filmant des rails de train, toujours en gros plan, défilant sur l’écran. On pense bien sûr à "Shoah", mais on se dit que quelques secondes auraient largement suffi à cette évocation. On voit quelques spectateurs quitter la salle, et on hésite à faire de même. Finalement, on se laisse bercer par ces images lentes, très lentes, et par les textes en hébreu et en allemand de Munio, de son épouse, de la poétesse israélienne Léah Goldberg, lus par Jeanne Moreau et Hanna Schygulla, retraçant quelques bribes d’une vie entre le Bauhaus, l’Allemagne nazie, la Suisse et la Palestine. Amos Gitaï a paradoxalement choisi la forme de la berceuse : lenteur imposée, douceur insidieuse, pour mieux évoquer la violence faite à son père par les nazis. On en sort reposé, vaguement ennuyé, et prêt à attaquer un bon film d’action.

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